« Je suis propriétaire d’un appartement que je souhaite mettre en location. Je me demandais si je devais facturer séparément les charges de chauffage et d’eau chaude à mon locataire, et si oui, comment les fixer. Dois-je par ailleurs prévoir un acompte, une provision ou un forfait ? ». Maître Anne Hiltpold, Avocate CGI Conseils, répond à Grégoire G., Genève.
La loi prévoit que les frais accessoires ne peuvent être mis à la charge du locataire que pour autant que ceci ait été convenu spécialement dans le contrat. Par frais accessoires, il faut entendre par exemple les frais de chauffage et d’eau chaude, les taxes publiques qui résultent de l’utilisation de la chose (taxes d’épuration des eaux usées ou d’enlèvement des ordures) ou les autres frais d’exploitation (frais de concierge, redevances pour le réseau de télévision par câble, électricité, gaz ou climatisation ou encore les frais d’exploitation de l’ascenseur).
La loi n’oblige toutefois pas le bailleur de facturer séparément ces frais au locataire et le bailleur peut tout à fait décider de les inclure dans le loyer. On parle alors d’un « loyer, charges comprises ». Dans ce cas, le loyer rémunère tous les frais accessoires, y compris le chauffage et l’eau chaude, et ce de façon implicite.
Si en revanche le bailleur entend faire supporter au locataire ces frais accessoires, le contrat de bail devra contenir une clause précise afin que le locataire puisse comprendre quels sont les éléments qui lui seront facturés en plus du loyer.
Le bailleur peut facturer de plusieurs façons ces frais accessoires. Le bailleur peut tout d’abord convenir avec son locataire que ce dernier paiera directement auprès de tiers les factures de frais accessoires. Cela se rencontre très souvent en pratique dans le cadre de la location de maisons individuelles, où le locataire se charge lui-même de commander et de régler son mazout, ainsi que d’entretenir la chaudière ou d’autres installations en contractant les contrats de maintenance avec les entreprises spécialisées. Dans les appartements, le locataire paie aussi directement l’électricité au fournisseur. Si des installations individuelles de chauffage et/ou d’eau chaude existent, le locataire s’acquittera aussi directement des factures y relatives en mains de tiers.
Il est par ailleurs possible de prévoir, dans le contrat de bail, que le locataire paiera un forfait mensuel pour couvrir les frais accessoires usuels. Ce montant doit être fixé à l’avance et ne peut être modifié en cours de bail. A l’échéance du bail, le bailleur peut toutefois augmenter le montant du forfait par le bais d’un avis de majoration officiel. Ce système peut être défavorable à l’une ou l’autre des parties, selon si le total des frais accessoires est supérieur ou inférieur au montant du forfait. A l’heure où le prix de l’énergie et de l’eau a tendance à beaucoup varier, ce système est peu appliqué. Il offre en revanche l’avantage d’occasionner moins de travail au bailleur, qui n’est pas tenu de fournir au locataire chaque année un décompte des frais accessoires.
Dans la majeure partie des cas, les frais accessoires sont facturés sous forme d’acomptes provisionnels, communément appelé les provisions pour charges (les termes « acomptes » ou « provisions » désignent en réalité la même chose). Le locataire règle généralement chaque mois un acompte, dont le montant est fixé dans le contrat de bail, puis un décompte est effectué en fin d’année ou en fin de période de chauffe. Le coût effectif des frais accessoires supporté par le bailleur sera comparé aux acomptes versés par le locataire et la différence fera l’objet d’un solde supplémentaire à verser par le locataire, dans l’hypothèse où les acomptes versés seraient inférieurs au coût total. Dans l’hypothèse inverse, c’est le bailleur qui devra rembourser au locataire le montant versé en trop. Un décompte doit bien évidemment être établi et communiqué au locataire, et ce chaque année.
Au moment de la signature du contrat, le bailleur n’a pas l’obligation d’informer le locataire sur le rapport entre le montant des provisions et celui du dernier décompte annuel des charges. Ainsi, si le montant des provisions a été fixé largement en dessous du montant effectif, le locataire devra néanmoins s’acquitter du solde important en fin d’exercice. Il est néanmoins recommandé de tenter de fixer le montant de l’acompte au plus près, afin d’éviter des mauvaises surprises de part et d’autre. Le montant des acomptes provisionnels pourra être revu à la hausse, pour l’échéance contractuelle, mais toujours par le biais de l’envoi d’un avis de majoration officiel respectant les délais légaux.
Pour répondre à vos questions, vous n’êtes pas obligés de facturer séparément les frais de chauffage et d’eau chaude à votre locataire, mais vous pouvez tout à fait les inclure dans le loyer, qui sera « charges comprises ». Cette solution, comme celle du forfait, à l’avantage de vous éviter d’établir un décompte annuel, mais elle ne vous permet pas de revoir le loyer ou le montant du forfait sans autres. Compte tenu des fluctuations possibles des prix de l’énergie, il me semble plus opportun de faire supporter au locataire le coût effectif des charges de chauffage et d’eau chaude et de lui demander de vous verser une provision mensuelle. Le locataire vous versera ainsi un acompte mais il conviendra que vous effectuiez un décompte chaque année. Par précaution, il n’est pas non plus inutile de rappeler dans le contrat que l’électricité sera à sa charge et réglée directement par le locataire au fournisseur.
Il ne m’est bien évidemment pas possible de vous indiquer de manière précise quelle sera le montant de la provision à mentionner dans le contrat. Il conviendra pour cela de vous fonder sur le dernier décompte de vos charges de chauffage et d’eau chaude afin de prévoir un acompte qui soit au plus près du coût effectif qui sera ensuite facturé au locataire. Toutefois, même si l’acompte fixé s’avérait trop bas, il ne saurait vous en être tenu rigueur et votre locataire devra vous régler le solde, sur la base d’un décompte que vous devrez vous fournir. Le montant de cet acompte pourrait ensuite être réajusté dans le respect des prescriptions légales (envoi d’une formule officielle), ce qui sera sans nul doute dans l’intérêt du locataire.
Par Anne HILTPOLD, Avocate CGI Conseils
Teepee Real Estate
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